Derrière l’infamie de la pédophilie, des réalités à nuancer.
RĂ©digĂ© par Yuna SaudemontÂ
Un petit tour sur Google en tapant «pédophilie Québec», et le second lien à apparaître renvoie à un site de géolocalisation des pédophiles. Le pédophile a une figure populaire qui fait consensus: un pourri, un danger, un être abject. Il faut dire que le phénomène est suffisamment important pour que la haine épidermique s’insinue dans la réflexion: au Québec, pas moins (et possiblement plus) d’une femme sur cinq, et d’un homme sur dix, rapportent avoir été victimes d’agression sexuelle pendant l’enfance selon des études recensées dans L’agression sexuelle envers les enfants des Presses de l’Université du Québec. Cette réalité nous touche tous de près, sinon directement.
Cauchemar général
L’agression sexuelle pendant l’enfance est un fléau que l’on cherche à freiner, à défaut de pouvoir l’endiguer. Or, trop de confusion existe autour de ce phénomène et empêche potentiellement de prendre les mesures adéquates. Tout pédophile n’est pas un agresseur sexuel d’enfant, et tout agresseur sexuel d’enfant n’est pas un pédophile; les deux termes ne sont pas synonymes. C’est par cette précision essentielle que Franca Cortoni, psychologue et professeure agrégée de l’Université de Montréal introduit son cours sur la délinquance sexuelle. Comment traiter un problème si l’on déguise les faits sous des tas d’amalgames et d’imaginaires cathartiques de haine et de dégoût condensés sous un seul mot: «pédophile»? Il convient d’apporter un éclairage débarrassé des filtres affectifs qui conditionnent le regard à observer cette réalité de façon dichotomique. Il ne s’agit pas d’excuser les actes de quelque agresseur que ce soit. Le problème se pose à l’échelle sociétale et non pas individuelle, sans en nier l’interdépendance.
L’ampleur de l’agression sexuelle d’enfants est colossale, à travers le monde, les différentes cultures, et toutes les classes sociales. Le tabou qui lui est associé semble tout autant universel. En revanche, toutes les agressions sexuelles d’enfant ne sont pas commises par un seul et même type de démon populaire nommé «pédophile». Latifa Bennari, fondatrice de l’association L’Ange Bleu qui vient en aide aux victimes ainsi qu’aux pédophiles abstinents, propose d’utiliser le terme «pédosexuel» pour parler des abuseurs d’enfants et faire ainsi la différence entre des actes posés et des attirances ressenties. Le mythe du pédosexuel qui guette sa victime à la sortie de l’école pour la séquestrer et la violer dans la cave n’est pas représentatif de la réalité. La victime connait son agresseur dans 75 à 90% des cas. Il existe des agresseurs dits «extra-familiaux», et des agresseurs dits «intra-familiaux», c’est à dire du cercle de famille proche (le beau-père, le père, la mère, mais aussi les frères, et plus rarement les sœurs). Beaucoup d’agressions sexuelles d’enfants sont commises par des jeunes: 13 à 18% par des agresseurs âgés de moins de 13 ans, et environ 40% par des agresseurs âgés de moins de 20 ans, d’après des méta-analyses présentées dans l’ouvrage L’agression sexuelle envers les enfants.
Le danger des chiffres
De nombreuses études ont cherché à établir un profil-type de l’agresseur sexuel d’enfants. Aucune n’y parvient réellement et il n’existe pas de personnalité à proprement parler pédosexuelle. Différentes théories ont tenté d’établir un portait simplifié du pédosexuel (amalgamé sous le terme «pédophile»): quelqu’un qui avait lui-même été abusé sexuellement enfant, quelqu’un d’immature avec de faibles compétences sociales, quelqu’un de frustré sexuellement, etc. Cependant, si des facteurs de risque statistiques concernant l’agression sexuelle d’enfants peuvent être dégagés comme relativement réguliers quant aux agresseurs avérés, ils ne prédisent absolument rien et simplifient dangereusement la réalité. L’importance de nuancer ces études est manifeste: bien que de nombreux pédosexuels aient été victimes d’agressions pendant l’enfance, un enfant victime d’agression ne deviendra pas pour autant pédophile. La valeur conférée aux statistiques fait souvent croire à tort qu’elles sont prédictives et génère des craintes vives chez les victimes d’agressions. L’autre facteur de risque principal de devenir pédosexuel est l’attirance sexuelle envers les enfants, que nous appelons ici «pédophilie». Cependant, les études qui le rapportent sont menées à partir des pédosexuels identifiés et incarcérés (pas représentatifs de la majorité qui n’est pas inquiétée par la justice). De plus, il existe des pédosexuels qui ne sont pas pédophiles.
Certains pédosexuels ne sont pas attirés par les enfants en général: excités par simple sadisme, par absence d’empathie conjointe à une situation favorable d’exploitation, attirés occasionnellement par un enfant particulier, apprécié non pas pour ses caractéristiques infantiles mais à cause d’un regard confondu, etc. La définition de la pédophilie soulève beaucoup de débats, et la bible des psychologues, le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, ne s’aventure que jusqu’au terme «d’intérêt sexuel» pour les enfants. D’autres, comme Latifa Bennari, ou encore le psychologue Hubert Van Gijseghem, peuvent parler «d’orientation sexuelle», assumant l’irréversibilité et la dimension affective que ce concept comprend. Il existe des pédophiles attirés exclusivement par les enfants (d’un certain âge, d’un certain sexe ou non), et de nombreux autres attirés également par des adultes. Certains passent à l’acte, d’autres non. Une large partie de la population vit sa pédophilie dans l’abstinence.
Pédophiles abstinents laissés pour compte
Ces personnes, trop diabolisées pour s’exprimer, trop isolées pour recevoir de l’aide dans leur détresse, s’amalgament souvent elles-mêmes avec des images de monstres, oubliant que leur identité ne se résume pas à cette orientation sexuelle. Plusieurs témoignages sont réunis dans l’ouvrage de Latifa Bennari Pédophiles, ex-auteurs, et victimes paru en 2014. Aucun espace n’est prévu pour venir en aide à ces personnes, la seule prise en charge existante est une prise en charge institutionnelle après un passage à l’acte condamné en justice (à Montréal le Groupe Amorce vient en aide aux pédophiles déjà condamnés, et il n’existe pas d’autre organisme communautaire pour cette population). Bien que des statistiques représentatives manquent, les cliniciens en contact avec cette population constatent que cette orientation sexuelle déviante se déclare souvent à l’adolescence. Des témoignages directs expriment le désarroi de ces jeunes qui ne peuvent sortir de leur honte anxiogène permanente en avouant leur orientation à d’autres personnes que celles partageant le même intérêt. Comment s’étonner que certains finissent par se convaincre entre eux que c’est la société qui a tort et qu’ils ne font pas de mal s’ils laissent s’exprimer leur amour sexualisé pour les enfants? Il semble trop tard pour s’étonner ensuite qu’ils cèdent à leurs pulsions… Hormis l’association L’Ange Bleu en France et une ligne d’écoute pour personnes pédophiles en Allemagne, les espaces qui viennent en aide à ces personnes sont inexistants. Coller l’étiquette du criminel sexuel dangereux semble plus facile que de tendre la main aux nombreux pédophiles qui ne désirent pas céder à leur pulsion. Les réactions lors des rares propositions d’aide révèlent l’ampleur de ce phénomène passé sous silence: Latifa Bennari raconte avoir reçu quantité de courrier de personnes pédophiles à la suite de sa participation à une émission de la radio montréalaise Radio X le 9 février 2014.
Tout le monde crie au loup contre les pédophiles. Paradoxalement, un enfant qui dévoile son agression sexuelle est fréquemment soupçonné de mentir et encouragé à se taire par ses proches. De l’autre bord, des pédophiles soucieux de ne pas passer à l’acte ne peuvent trouver aucune aide. Diaboliser la pédophilie, n’est-ce pas une manière de loucher pour ne rien voir du problème réel en partageant une bonne conscience consensuelle?
© 2015, Le DĂ©lit, Yuna Saudemont - 10 fĂ©vrier 2015
Latifa Bennari parle sur Bob Vous Dit Toute La Vérité et essaye d'apporter un peu d'humanisme et de bon sens dans un débat haut en couleurs...
Vous pouvez écouter l'intégrale de l'émission à cette adresse, participent Laurence Beneux et Alexandre Rouge
© 2014, Bob Vous Dit Toute La VĂ©ritĂ© - 29 mars 2014
Un documentaire de Céline Rouzet et François Teste
Diffusé sur France Culture le 27 mars 2014 à 17:00, vous pouvez l'écouter à cette adresse
Le sujet est axé sur les groupes de parole de l’Ange Bleu. Information dans le programme de Télérama de la semaine courante.
Des pĂ©dophiles abstinents et repentis sont placĂ©s face Ă d’anciennes victimes pour lutter contre le passage Ă l’acte. A travers ces groupes de paroles «mixtes» organisĂ©s par une association parisienne, les pĂ©dophiles sont confrontĂ©s Ă la souffrance des victimes, qui peuvent avoir le sentiment d’une reconnaissance jamais obtenue jusqu’alors. Certaines victimes souffrent beaucoup du dĂ©ni de leur agresseur.Â
C’est en 2012 que Céline Rouzet rencontre Latifa Bennari, présidente de l’Ange Bleu et elle-même ancienne victime. « C’est l’incroyable humanité de cette initiative qui m’a frappée : accepter du « monstre » qu’il soit humain, percevoir sa solitude et ses angoisses, lui tendre la main en l’écoutant plutôt que de le clouer au pilori. »
Avertissement : Ce documentaire propose les témoignages bruts enregistrés lors du groupe de parole de novembre 2013. Il est déconseillé aux mineurs et aux personnes sensibles.
Production : Céline Rouzet
Réalisation : François Teste
Prise de son : Arthur Gerbault
© 2014, France Culture, 23 mars 2014
«J’ai 19 ans. Je suis Ă©tudiant. Il y a approximatiÂvement un an et demi, je suis tombĂ© par hasard sur une photo d’une petite fille… j’ai l’impression d’être un monstre.»
L’auteur de ces lignes, que nous appellerons Geoffrey, est un Québécois. Il compte parmi le nombre croissant d’hommes aux prises avec des pulsions pédophiles qui lancent un appel à l’aide parce qu’ils détestent ce qu’ils sont.
Souvent désespérés du manque de ressources au pays, ces Québécois s’adressent à un organisme français fondé par une victime de viol qui pense que la société a tout intérêt à aider ceux qui visent réellement l’abstinence.
Un autre homme du Québec, appelons-le Jacques, raconte ainsi ses premières expériences: «J’avais découvert la pornographie pédophile par hasard en cherchant une solution sur internet. Malheureusement, c’est en allant sur les forums de discussions entre pédophiles que ma curiosité m’a poussé à aller sur les sites pédophiles et c’est le plongeon dans la spirale de la dépendance.»
Une porte ouverte
La découverte de l’existence d’un organisme d’aide l’a empêché de se suicider et lui a donné une porte où frapper, dit-il.
L’initiatrice de L’Ange bleu, Latifa Bennari, confirme qu’elle compte plusieurs Canadiens et QuĂ©bĂ©cois parmi les hommes qui la contactent. Sa ligne d’écoute est unique en son genre et vise Ă tendre la main aux pĂ©dophiles qui veulent Ă tout prix Ă©viter de faire du mal aux enfants. Mme Bennari a elle-mĂŞme Ă©tĂ© victime de viol entre l’âge de 7 et 14 ans. Elle n’éprouve aucune complaisance pour les pĂ©dophiles, mais elle explique: «J’ai dĂ©couvert une grande souffrance, une grande soliÂtude. Les pĂ©dophiles n’ont nulle part pour chercher de l’aide.»
Absence de ressources
Jacques dit en effet avoir longtemps cherché une association, un psychiatre ou thérapeute pour l’aider à comprendre ce qu’il qualifie de déviance. «Comme en Europe ou aux États-Unis, les médias et les psys [au Canada] ne connaissent que les agresseurs, les criminels d’enfants et ne font pas la différence entre un père incestueux et un pédophile abstinent.»
À ceux qui jugent la démarche de L’Ange bleu controversée, Latifa répond qu’il n’est nullement question d’excuser les gestes de nature sexuelle envers des mineurs. Mais elle juge que l’approche répressive seule n’aide pas à régler le problème. «Au Canada comme en France, la justice part du principe que le pédophile va forcément passer à l’acte et que le délinquant va récidiver.» Elle estime que la plupart des pédophiles cherchent justement à refouler ce désir. L’Ange bleu, dit-elle, est là pour les accompagner.
© 2014, Le Journal de MontrĂ©al, Florence Meney - 9 fĂ©vrier 2014
Une réunion sur le thème de la pédophilie en présence de Latifa Bennari aura lieu le jeudi 28 mars 2013 à la salle municipale du "Chanoine Bos" à Ris-Orangis. La soirée débutant à 19h30 comprend un buffet dînatoire suivi d'un exposé puis d'un débat public.
Venez nombreux-ses
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© 2012, Le Messager (Chablais), Y.S. - 07 fĂ©vrier 2013
Nous dérogeons cette fois à la règle de ne point faire
promotion d'oeuvres étrangères à notre action.
Etrangère ? Pas tant que ça :
Le dernier film du réalisateur de Festen, le danois Thomas Vinterberg, tout juste sorti ce 14
novembre 2012, a retenu en effet toute l'attention de Latifa
Bennari pour le développement et le ton donnés dans ce film
sur un sujet sensible : les allégations mensongères, la
rumeur, la perte de dignité de l'accusé à tort. Un phénomène
qui peut frapper n'importe qui, n'importe quand et dont on ne
peut sortir indemne. A partir de quand la légitime prudence
devient chasse à l'homme et comment en préserver la société ?
Le débat est ouvert.
Un débat qui aurait été intéressant d'avoir lors des
projections en avant-première avec le réalisateur.
Malheureusement, nous n'avons pris connaissance de
l'existence de ce film qu'après sa sortie et les impératifs
propre au monde cinématographique ne permettent désormais
plus d'organiser ce genre d'événement autour de ce film.
Mais nous pouvons toutefois vous recommander d'aller le voir
avec vos ami(e)s et proches, en vous rappelant qu'ici, Ă
l'Ange Bleu, nous traitons de nombreux cas comme celui du
personnage de Lucas, ce qui démontre bien qu'en nos sociétés
nous sommes tous potentiellement vulnérables, ce en quoi
Thomas Vinterberg a vu juste !
© 2012, Pretty Pictures
Il s'agit d'une expérience unique en France. Une association propose de venir en aide aux victimes de pédophilie et aussi
d'épauler des pédophiles. Quelques-uns sont passés à l'acte, ont parfois été
condamnés alors que d'autres font appel à l'association Ange bleu pour éviter
de franchir le pas.
Tabou, ce travail ne bénéficie d'aucune aide. Pourtant de plus en plus de
spécialistes du monde judiciaire et médical, en France et à l'étranger, se
penchent sur cette façon d'aborder les choses…
© 2012, AllĂ´docteurs / France 5, Auriane Baudin, Matthieu Wiebaud
et Jean-Philippe Belleudi - 1er juin 2012
Pour voir le reportage : http://www.allodocteurs.fr/actualite-sante-pedophilie-prevenir-le-passage-a-l-acte-7215.asp?1=1
Pour soutenir l'Ange Bleu : cliquez ici
Le conseil jeunes de la commune Saint-Priest-en-Jarez (Loire, Rhone-Alpes) a eu l’idée originale de réaliser un hymne dans le but de promouvoir les Droits de l’Enfant en France et dans le monde.
La création des textes, de la musique et de la chorégraphie sont conçus par plus de 600 enfants et jeunes (choristes, musiciens et danseurs) de la commune mais également avec le concours de nombreuses associations et partenaires participant au projet.
Yannick Noah participera à l'aventure puisqu'il s'est engagé à devenir le parrain officiel de l’HODE. Autour d'un grand nombre de personnes, il sera ainsi présent, le 27 juin 2012, au Zénith de St-Etienne, lors de la cérémonie officielle.
L’association L'Ange Bleu apporte bien évidemment tout son soutien à la réalisation de l’HODE, en vertu de son engagement et de son combat en faveur des Droits de l'Enfant. Nous rêvions d'un symbole fort à partager et diffuser le plus largement possible, ils l'ont fait. Bravo !
Le CD audio est actuellement en cours de d'enregistrement le DVD de son clip seront mis en vente à partir du 27 juin 2012. L'ensemble des fonds collectés seront reversés aux associations impliquées dans ce combat qui nous est à tous commun.
Nous nous réjouissons par ailleurs de cette initiative qui aura pour effet de porter sur le devant de la scène le rôle essentiel que jouent l'ONU et les organisations qui lui sont affiliées, les ONG et personnalités engagées pour le respect de ces droits dans le monde.
En ce qui concerne l'ONU, nous considérons en effet qu'elle est la seule organisation internationale à pouvoir garantir ces droits sur le plan mondial comme elle devrait l'avoir sur toutes les questions d'intérêt commun, avec pouvoir de contrainte juridique placé au sommet de la hiérarchie des normes et capacités effectives d'harmonisation dans un cadre démocratique. Le projet HODE s'inscrit dans cette dynamique car il sollicitera à nouveau l'attention que devront porter les décideurs sur la question des Droits de l'Enfant et ce, nous l'espérons, de façon durable.
Pour en savoir plus sur ce projet : http://www.hymneofficiel-droitsdelenfant.fr/
© 2005 : Association L'Ange Bleu - Conception : KANYOO - Développement : Willm N.
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